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26 avril 2006

Situation économique et sociale de la Kabylie début 2006

M.BENHAMZA Hocine


Au lendemain de la criminelle répression des émeutes d’octobre 88, la dictature algérienne est entrée à reculons dans l’économie de marché. Quelles en ont été les conséquences sur la Kabylie au plan économique et social ? Economie en voie d’émergence
ou, pour utiliser l’expression de Said Sadi, économie de bazar ?

Pendant des siècles, l’agriculture a permis au peuple kabyle de mener une vie certes austère, mais digne. Qu’en est-il une quarantaine d’années de révolution confisquée ?
La politique de regroupement des populations et l’institution de zones interdites par l’armée française ont pendant la première guerre d’Algérie ont provoqué une forte dépaysannisation en Kabylie selon le mot de Bourdieu-Sayad. Un quart de siècle de socialisme de la mamelle, de mythologie (Révolution industrielle, agraire et culturelle) ont façonné des mentalités d’assistés. Les promesses de la solution islamique n’ont abouti qu’à d’impitoyables massacres et à la fuite de populations rurales vers les villes.

Un séjour de deux mois en Grande Kabylie nous a permis d’observer la réalité économique et sociale de cette région très fortement dépendante du commerce d’importation.
C’est pourquoi, à l’inverse de la démarche classique des économistes nous commencerons par parler du commerce de détail. Nous montrerons aussi à qui profite cette prospérité apparente.

Le commerce de détail est l’activité essentielle. La Kabylie donne l’impression d’être une immense épicerie. Il y a les magasins traditionnels, dits alimentation générale. Mais aussi les boulangeries / pâtisseries où le pain est abondant et disponible toute la journée. Dans les chefs-lieux, on trouve des supérettes en assez grand nombre.
Phénomènes nouveaux :
- La vente de poisson congelé et de viande d’importation réfrigérée
- Les Vins et liqueurs (surtout de la bière locale ou importée)
Les anciennes Galeries algériennes sont fermées ou privatisées. Certaines ont été données à leur personnel.
Les drogueries et les quincailleries ont une activité intense. Elles vendent des articles de trois provenances : France ou Allemagne, les plus chers et de meilleure qualité ; Espagne, Turquie (moins cher et de qualité moyenne) ; la Chine, Taiwan, le Pakistan, prix plus bas et qualité médiocre.. Parmi les produits fabriqués en Algérie, on trouve surtout les peintures, le ciment et le plâtre, de la vaisselle et des récipients en matière plastique.

Fruits et légumes : les boutiques sont nombreuises dans les chefs-lieux mais on en trouve quelques-unes dans les villages.
Le fruit le plus abondant est l’orange. Selon la grosseur, 70 à 90 dinars. On trouve des bananes à cent dinars. Les pommes produites en Algérie sont de bonne qualité et se vendent 150 dinars.
Les dattes de moyenne qualité coûtent 250 dinars. Elles sont peu consommées en Kabylie à cause de la tradition et de leur prix élevé. Les figues sèches sont rares.
Le légume de base est la pomme de terre. Celle produite dans le grand sud est propre. Celle du Nord est enrobée de terre argileuse. On trouve en abondance des courgettes, des tomates, de la laitue.
Les légumes sont moins chers que les fruits.

Les marchés grouillent de monde et de marchandises. Outre les fruits, les légumes et la viande locale, on y trouve beaucoup de friperie, de quincaillerie et d’épices. On y trouve aussi des chaussures en caoutchouc ou en cuir de grossière facture, fabriquées localement. Les vêtements de confection et les sous-vêtements pour hommes sont abondants mais de qualité médiocre (origine turque notamment.)
Il y a le coin des plants d’arbres (orangers, figuiers, néfliers, pommiers etc.)
En dehors de la période précédant l’aïd, il se vend très peu de bétail. Le commerce des ânes et de la sellerie s’est raréfié.

Les prestataires de services

Cette expression désigne des activités de réparation dans des domaines comme la mécanique, la vulcanisation, la serrurerie, la ferronnerie, l’électroménager, la photo, l’électricité, la plomberie, le chauffage, le sanitaire, la télévision, la radio. Les boutiques de téléphonie mobile sont assez actives. Il y a des installateurs de climatiseurs, des menuisiers, des vitriers. Sans oublier les coiffeurs.
Certains jeunes sont appréciés par la SONATRACH qui les utilise dans les exploitations pétrolières et gazières. D’où les émeutes de Ouargla en 2005
Les prestataires de services sont jeunes et dynamiques. Ils travaillent généralement à deux dans de petits ateliers. Leur nombre est loin d’être négligeable. Ils sont installés surtout dans les chefs-lieux de communes mais aussi dans des villages.

Les transports

Si la circulation automobile était un indicateur de développement économique, son intensité en Kabylie est telle qu’on se croirait dans une région hyper développée. Les routes nationales sont tellement fréquentées qu’on dirait des boulevards de grandes villes. Comme ce sont des routes à deux voies, les dépassements y sont difficiles et dangereux. Il y a une abondance de camions de moyen tonnage, un très grand nombre de fourgons de voyageurs et un nombre incalculable de voitures particulières. La plupart de ces dernières ont moins de cinq ans. Pourtant, les véhicules coûtent assez cher. Ne parlons pas de la Golf - elle vaut 180 millions de centimes, soit près de 19 ans de Smig. Les voitures sud-coréennes ne coûtent que 700.000 dinars en moyenne ce qui représente quand même 7 ans de Smig. Les françaises sont en majorité.
Le prix du transport de voyageurs est fixe. Celui des marchandises par petits véhicules résulte d’un marchandage

L’habitat

Tizi Ouzou avec sa Nouvelle Ville et le fameux boulevard des douze salopards ; Vgayet avec l’ancien site de La Plaine et la Cité Ihadadène ont littéralement explosé. Tigzirt et Azeffoun ont pris d’assaut les pentes, Fort National est sorti de ses remparts, avec ses nouveaux quartiers aux noms pittoresques (Jumbo, la Cité fantôme.)

Dans les chefs-lieux de communes il y a des bâtiments à usage collectifs réalisés par la CNEP ou les EPLF. La crise du logement sévit dans les chefs-lieux mais moins que dans les autres régions d’Algérie. Ainsi que l’avait reconnu lors de son voyage à Moscou en 1986 un ministre de Chadli, les Kabyles se prennent en charge, ils n’attendent pas tout de l’Etat.

Des changements profonds ont affecté le paysage. Dans tous les villages se sont élevées des constructions à étage, parfois jusqu’à 5 niveaux.
De façon quasi systématique, le rez-de-chaussée est aménagé en garages, en magasins ou en ateliers. Les constructions érigées pour des particuliers se font, sauf exception, sans plans d’architecte.

La maison kabyle traditionnelle à un seul niveau est en voie de disparition. L’habitat collectif dans une hara est devenu l’exception. La famille nucléaire habite seule dès qu’elle en a les moyens.
Les plus pauvres continuent à occuper une seule pièce (le père, la mère et leurs enfants mineurs.) Les moins pauvres entreprennent de construire une grande maison mais les travaux durent longtemps (dix ans, parfois davantage.)

Les matériaux de construction sont abondants mais très coûteux. Sans le repas, le maçon est payé 1.000 dinars par jour ; le manœuvre 600. La main d’œuvre n’est pas couverte par une assurance. Le maçon effectue tous les travaux à l’exception de la plomberie et de l’électricité.

L’agriculture

La récolte d‘olives est abondante cette année. Les olives sont gaulées et ramassées selon la méthode traditionnelle, archaïque. Le degré d’acidité de notre huile est excessif. Le litre d’huile coûte entre 200 et 250 dinars.
La production d’huile d’olive ne couvre pas la consommation de matières grasses végétales. Le complément est fourni par les huiles de colza ou de tournesol obtenues à partir de graines importées. On trouve de l’huile d’olive importée d’Espagne ou produite en Oranie.
Les régions de Seddouk, Ighil Ali, Mechedilla produisent une huile de meilleure qualité que celle de la Grande Kabylie. Un salon de l’agriculture est organisé chaque année, à Bougie.
Il ne semble pas y avoir de chiffres sur la production d’huile d’olive en Kabylie.

La production de figues sèches est en voie de disparition sauf en Petite Kabylie. La production de cerises a pratiquement disparu.

Le PNDA (Plan National de Développement Agricole) a stimulé la plantation d’arbres
fruitiers, oliviers pour l’essentiel, et introduit des méthodes modernes comme les tailles de régénération et les cuvettes de retenue des eaux de pluie. Cependant, faute d’eau pour arroser les plants pendant les trois mois d’été, la survie des arbustes est aléatoire.

La production de fruits et légumes en Kabylie ne couvre pas les besoins. Une bonne part provient de la Mitidja. La production de melon est abondante mais le melon d’Oranie est de meilleure qualité.
La consommation de pastèque est impressionnante. Ce fruit, à faible valeur nutritive, est produit en Kabylie pour l’essentiel. L’autre fruit d’été est le raisin mais son prix élevé en limite la consommation. La plupart des consommateurs se rabattent sur les boissons gazeuses.

L’élevage

Deux facteurs limitent l’élevage bovin : la faible disponibilité; donc le prix élevé du fourrage et du son ; la pénibilité de la tâche.

On trouve un peu partout des poulaillers industriels. La production couvre la consommation. Des élevages de cailles ont été entrepris mais sans ampleur.

L’apiculture

Des ingénieurs agronomes se sont mis à l’apiculture avec l’aide des services publics agricoles qui leur fournit gratuitement des ruches et des essaims. D’autres apiculteurs sont aidés dans le cadre du PNDA. Les essaims sont vendus aux coopératives publiques.
Le miel reste un produit de luxe. Le matériel d’apiculture est très coûteux. Le métier d’apiculteur intéresse trop peu de monde. Il exige un capital de démarrage, la volonté de l’apprendre. Et aussi de ne pas craindre les piqûres d’abeilles.

L’industrie

Les anciennes entreprises publiques sont soit dissoutes (SNLB) soit privatisées soit en voie de l’être. L’ENIEM contribue tant bien que mal à produire de l’électroménager mais la concurrence des importations est très sévère. Par exemple les climatiseurs. A Fort National, la COTITEX tient bien la route. La Socothyd des Issers continue à fonctionner. Il en est de même de la coopérative laitière de DBK qui continue à collecter du lait et à produire du fromage.
Construite à l’instigation de l’ex président de l’APW de Tizi Ouzou, la briqueterie d’Oued Aïssi couvre les besoins de la région.
Les huileries se sont multipliées en même temps que le retour au ramassage des olives.

Du côté du secteur privé, Issad Rebrab est solidement implanté à Bgayet. Il y produit de l’huile de table sous la marque Cevital. Il est en train de réaliser une raffinerie de sucre dans les environs du port. Dans des déclarations à la presse, cet industriel se plaint du mauvais fonctionnement des banques et des formalités longues et compliquées.
Le groupe Blanki dispose de capitaux importants. Il appartient aux Cherfaoui, une vieille famille de Fort National qui avait obtenu un financement pour construire une unité de carrelage à Médéa.
Ajoutons que cette famille exploite, depuis l’époque coloniale, une briqueterie à Affreville. Elle possédait de vastes terres à blé dans ma vallée du Chélif. Elles leur ont été confisquées à l’époque de la pseudo Révolution agraire. Profitant de la libération des importations, les Cherfaoui ont réalisé de grosses opérations commerciales. Pour l »instant, ils investissent dans la grande distribution mais dans l’Algérois.

Il existe des fabriques de mobilier domestique de bonne qualité.
C’est surtout l’agroalimentaire qui prospère avec les eaux minérales (Ifri, Lalla Khedidja, Toudja) et la fromagerie (DBK et Makouda.)

En somme, le bilan industriel est mince. Les investissements publics sont à l’arrêt depuis pratiquement l’année 1980 mais c’est le cas dans l’ensemble de l’Algérie. A l »époque de Chadli, le rêve des industries industrialisantes a été abandonné.. Le secteur public avait montré ses limites. Il a été un gouffre pour les ressources e l’Algérie en devises (déficits énormes, sureffectif, gestion défectueuse.)

Le tourisme

On peut parler de frémissement. Quelques hôtels, bars, restaurant ont été édifiés à Tigzirt, Azeffoun et Vgayet. Leurs prestations sont sommaires. Ce sont des établissements pour nationaux. Certains d’entre eux sont des lieux de prostitution. A Tigzirt, le Mizrana, un hôtel étatique avec piscine, vient d’être privatisé. Il en de même des Hamadites à Tichy.
A Vgayet, un ancien cadre de la Banque centrale a obtenu un financement et érigé un hôtel de relatif grand standing.

Les infrastructures

Sur l’autoroute Alger – Tizi, deux importants contournements ont été réalisés : celui des Issers et celui de Tizi Ouzou.
Les routes nationales sont en bon état. Il n’en est pas de même des départementales, des communales et des pistes. L’ensemble de la voirie urbaine est très dégradé mais il en est ainsi dans toute l’Algérie, y compris dans les grandes villes.
Le barrage de Taksebt constitue un ouvrage splendide. 60 mètres dans sa ^plus grande profondeur. Il remonte presque jusqu’au pont de Takhukht, sur une quinzaine de kilomètres. Il servira à alimenter les wilayas de Tizi, Boumerdès et une partie de celle d’Alger. Les autorités de la wilaya de Tizi comptent mettre fin aux pénuries d’eau potable mais la maîtrise des stations de pompage et la gestion des réseaux laissent à désirer. La brume provoquée par l’évaporation va peut-être créer un micro climat humide.

L’emploi

Le taux de chômage est élevé mais on constate un refus du travail agricole. Des opérations telles que le micro crédit n’existent pas en Kabylie.
De plus en plus de jeunes filles travaillent dans les bureaux ou l’enseignement. Phénomène nouveau, certaines tiennent un commerce.
Seules les femmes âgées continuent à travailler dans les champs, ramassage des olives surtout. On rencontre des femmes âgées bergères avec de tout petits troupeaux de moutons et de chèvres. Les femmes instruites non occupées à l’extérieur vivent au foyer et en sortent rarement.

La situation sociale

En raison de la cherté des médicaments, la plupart des malades ne peuvent pas avancer l’argent nécessaire pour la totalité d’une ordonnance. Pour les assurés, le remboursement va de 65 à 85 %. Très peu bénéficient d’un complément mutualiste. Cependant, les médicaments à vie sont achetés dans des pharmacies conventionnées directement payées par la caisse d’assurance.
Le coût des prestations médicales du secteur public est plutôt bas. La consultation de généraliste privé tourne autour de 100 dinars, celui du spécialiste varie de 600 à 800 dinars.
Les soins dentaires sont peu remboursés. Il en est de même pour les lunettes.
L’hospitalisation en clinique privée est extrêmement chère et les remboursements insignifiants.
Il arrive que des patients soient soignés à crédit. On peut véritablement parler d’une santé publique à deux vitesses.

L’école

Dans l’école publique, le taux moyen de réussite au Bac 2005 a été de 25. A noter que dans dix-huit lycées il n’y a eu aucun reçu au bac. Le ministre e l’éducation nationale a menacé de révoquer les dix-huit proviseurs concernés.
%. Dans les grands centres, les classes sont toujours surchargées mais, dans les petites localités, la pression est moins forte.
Pendant plusieurs années, les autorités ont fermé les yeux suer la création d’écoles privées. En février 2006, elles se sont mises à les fermer pour défaut d’agrément. Surtout en Kabylie mais aussi à Alger et Constantine. Il s’agit d’une concession aux arabo islamistes. Le gouvernement veut les obliger à enseigner tout en langue arabe. Le français est la principale langue 'enseignement dans ces écoles. Dans l’un des lycées privés le taux de réussite au bac français été de 82% contre 24% de moyenne nationale pour l’école publique arabisée. Notons que la fermeture est intervenue au milieu de l’année scolaire.

La formation professionnelle

Il existe des centres de formation de maçons ; de mécaniciens ; de menuisiers, d’électriciens etc. Il arrive que les diplômés de ces centres restent longtemps sans emploi. Soit parce qu’il y a peu de création d’emploi, soit parce que l’information circule mal, voire ne circule pas.

En ce qui concerne la vie quotidienne, signalons les fréquentes coupures d’eau (de un à trois jours) et les coupures d’électricité de courte durée. La plupart des foyers utilisent le gaz butane, faute de gaz de ville. Actuellement, le gaz est disponible mais le prix de 170 dinars la recharge grève les petits budgets, de loin les plus nombreux.
Le lait reconstitué coûte 25 dinars le litre. L’annonce de son augmentation de 5 dinars a semé la panique chez les consommateurs mais le prix est demeuré stable.
La viande de production locale reste cher. La viande importée l’est moins. La consommation de viande est faible. Le poisson se vend surtout sous forme congelée mais il n’est à la portée que des ménages aisés. La sardine est le poisson du pauvre mais à 100 dinars le kilo elle n’est pas à la portée de tous.
La semoule et le pain restent les aliments de base Le pain coûte 8 dinars la baguette de 300 grammes.

L’environnement

Si les chefs-lieux sont moins sales que ceux d’autres régions d’Algérie, les proches environs des villages de Kabylie sont des poubelles à ciel ouvert. De nombreux villages ne possèdent ni incinérateur, ni service d’enlèvement des ordures. Le maire de Fort National a essayé de régler le problème mais il s’est heurté à l’impossibilité de trouver un terrain de décharge. A 8 kilomètres de Michelet, les ordures sont déversées sur une pente et brûlées mais une partie reste au bord de la route. De nombreux tas nauséabonds jalonnent la route entre le pont de Acif el Djema et Taourirt Menguellet.

Des incendies réduisent chaque été l’étendue du patrimoine forestier. Faute de moyens, il arrive qu’un incendie atteigne la lisière d’un village. Dans ce domaine la régression par rapport à l’époque coloniale est tristement nette.

De nombreuses sources, jadis pérennes, ont tari. Faute de Travaux de DRS (défense et restauration des sols - ne pas confondre avec le DRS ou Service secret Défense Renseignement et Sécurité.)
Les eaux des ruisseaux et rivières sont polluées. Autrefois, on s’y baignait.

La démographie

Elle est en baisse. Environ 2% de croissance annuelle. Si, chez les anciens couples, on trouve des familles de 14 enfants, ce n’est palus le cas chez les 30/40 ans. L’âge au mariage n’est plus de 15/20 ans. Il est plutôt de 25/30.

Le deuxième sexe

Les femmes âgées (plus de cinquante ans) sont généralement illettrées. Elles sont vêtues à l’ancienne. Elles ont le courage de travailler la terre.
Les femmes instruites sont enseignantes, employées de bureau, fonctionnaires. Le personnel des mairies, des banques, des assurances est en grande proportion féminin. Vis à vis du public, la femme n’a pas l’arrogance de l’homme. Les femmes exercent parfois des professions libérales.
En matière d’héritage, les règles coraniques s’appliquent désormais.
Certaines jeunes filles choisissent leur mari. Il arrive qu’un mariage contracté devant le maire soit annulé sur décision de la femme avant d’être consommé.
Dans les études, les filles réussissent mieux que les garçons.

Les jeunes

Il y a encore des suicides de jeunes, pour des raisons surtout sociales. On en parle moins, peut-être parce que leur nombre est en diminution ou parce que ce phénomène s’est banalisé.
On parle beaucoup de drogue chez les jeunes (ce n’est pas ostensible.) On parle aussi d’alcoolisme. Par exemple, à Fort National on trouve une dizaine de bars mais il ne s’agit pas d’un phénomène de masse. Il s’agit presque exclusivement de bière, surtout produite en Algérie et moins chère que la bière importée. Faible consommation de vins et liqueurs question de prix.
Il est beaucoup question de prostitution. Elle n’est pas ostensible. Elle n’est ni interdite ni autorisée : les autorités ferment les yeux.

Conclusion

Une économie très fragile car elle est subordonnée à la disponibilité des devises pour payer les importations. Pour l’instant, les revenus des hydrocarbures permettent de faire face.
Comme tous les Algériens nous mangeons notre pétrole.
Restreindre les importations mettrait au chômage les commerçants, jeunes en majorité ; continuer à les laisser libre freinerait la production interdirait à la production nationale de se développer : c’est la quadrature du cercle.

La marge bénéficiaire des importateurs est généralement supérieure à 100%. Leur objectif d’amasser le maximum d’argent dans le minimum de temps. En payant le moins possible d’impôts. Le développement durable est le dernier de leurs soucis. Pour les autorités également.
Les banques constituent un frein aux investissement créateurs d’emplois.

Une société inégalitaire avec une large prédominance de la pauvreté. La situation des kabyles n’est ni désastreuse ni prospère. Il y a une minorité très riche ou simplement riche.
La classe moyenne est surtout composée de commerçants et de fonctionnaires mais le pouvoir d’achat de ces derniers est faible. Ce phénomène, joint à l’absence de sanctions, explique sans doute la corruption.
La grosse majorité de la population vit dans la précarité. La malnutrition est très répandue mais il n’y a pas de famine.

A l’ancien tout-Etat a succédé l’absence de l’Etat. Les instances locales manquent de moyens financiers et de compétences. L’initiative citoyenne fait défaut.
Pourtant, les potentialités de progrès sont immenses dans l’arboriculture, l’élevage, l’artisanat, le tourisme.

Actuellement les jeunes veulent devenir commerçants, transporteurs ou émigrer. Or les portes de l’émigration sont verrouillées. L’agriculture constitue un immense réservoir de main d’œuvre mais la société kabyle est « dépaysanisée ». c’est une deuxième quadrature du cercle.
Il faudrait une autre politique conduite par d’autres institutions. Et des comportements qui conservent ce que la tradition comporte de positif, notamment la passion pour le travail et le souci de l’intérêt général tout en s’ouvrant à l’innovation et à la rationalité.


Fait à Paris, le 26 mars 2006

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