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Zighcult
6 octobre 2006

Rites calendaires

Si le rite nécessite une connaissance préalable de ses caractéristiques, il me semble que ces dernières pourraient être dégagées en comparant des rites appartenant à un contexte, rituel circonscrit. S'en tenir à une unité sociale, ici les Idaw Martini, pour y chercher les moyens de comprendre la mécanique (matière) du rite, fait apparaître la cohérence des éléments combinatoires qui fond, le system, rituel.

Il n'y a sans doute pas de bonne classification des rites, toutefois, comme je disposais d'un corpus de pratiques rituelles, l'idée me vint de faire, subir, systématiquement, à chacune d’elles une fragmentation, afin d'isoler ses constituants. Ce procédé, révèle, une redondance d’invariants communs à tous les rites, lesquels constituent leur charpente. Ces répétitions sons précieuses car elles permettent de déchiffrer le rite. En effet, leur combinaison met en évidence leur spécificité, permet leur classification, construire le system, et livre l'intention des auteurs.

Mise à l'épreuve, la méthode, aboutit à un premier constat la temporalité d'une opération rituelle, ou le rythme de son occurrence, est le critère déterminant d'une première classification. Ainsi, on remarque que le rite s'apparente nécessairement à une famille ritologique : calendaire ou occasionnelle ; qu'il contient une succession de faits globalement tripartites (avant, pendant et après une mutation) greffés sur une entité ritologique (ou sujet rituel) central, et structurante, traverse, par l'intention et l'action. Cette entité ritologique est représentée, par une personne (rites domestiques, rites religieux) ; un animal (rites sacrificiels) ; un végétal (rites agraires ou solsticiaux). Chaque entité renvoie à une ou plusieurs catégories ritologiques agraire ; solsticial, domestique, ; religieuse ; sacrificielle, subsumant à leur tour des unités ritologiques : « vannage » pour la catégorie agraire ; « mariage » pour la catégorie domestique, ; « pèlerinage » pour la catégorie religieuse ; etc.

Seul le souci d'appréhender et d'étudier aisément les rituels a imposé une sorte de répertoire, un découpage en chapitres et une typologie provisoires. La grand, diversité des sacrifices conduit a leur consacrer un chapitre, lequel répercute le system, rituel dans sa complexité (of. Sacrifices rituels). La construction systémique des rituels, apparemment autonomes, lui doit, en effet, d'avoir dégagé le pivot focalisateur de leurs diverses manifestations.

Le rite suppose l'inachèvement. Par lui, le groupe se donne le moyen de contrôler et d'articuler harmonieusement l'identité de ses membres, la fécondité des plantes et des animaux utiles. En soutenant la nature capricieuse, les rites agraires la guident vers l'efficacité biologique. A l’image des champs qu'elle assainit à des fins génératrices, la Société agit sur le corps humain par des ruptures le préparant à la maturation et à la plénitude. On peut suggérer que la domestication rituelle fonde la socialisation des hommes, des plantes et des animaux, dont ils attendent une efficience certaine.

Les rites calendaires ont lieu une seule fois dans l'année à date fixe, du calendrier agraire solaire ou du calendrier lunaire. Bien que caractérisé par une mobilité saisonnière et des pratiques acosmiques, ce trait du calendrier lunaire n'altère pas leur réitération annuelle mobile. Ces rites peuvent ou non coexister avec un sacrifice sanglant ou avec un meurtre symbolique, telle l'effigie lapidée durant la canicule. Le parler tachelhyt ne propose pas de terme pour le rite, il le designe par son objet sacrifice de mars (sacrifice de printemps), tigrsi (tighsi)n mars; imposition du nom de l'enfant, l’id n warraw ; purification rituelle des champs, assifd ; bûcher solsticial, tamasurt (tamachurt) etc

Les structures communautaires n'étant pas complètement éclatées, on pourrait s'attendre à des actions rituelles autochtones ; là oû l'influence de la cité agit à travers l'émigration, on assiste à une éclosion de type syncrétique, la modernisation quelque peu déstructurant n'étant pas encore achevée. Mais lorsque la communauté se projette en dehors des règles « traditionnelles », on remarque que l'ensemble des rituels — de registres ou de significations différents et non antinomiques — reste tout à fait homogène. Cette créativité cohérente n'est pas sans surprendre.

– Narjys El Alaoui, « Le Soleil, la Lune et la Fiancée végétale », Essai d’anthropologie des rituels : Les Idaw Martini de l’Anti-atlas, Maroc ; Edisud, Aix-en-Provence, 2001 ; P 37/ 38.

Source: Amazighweb.com


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