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Zighcult
27 décembre 2007

Gwana-diffusion

Le dernier concert de Gnawa diffusion à Alger : La musique qui transcende la douleur par Semmar Abderrahmane 

On les attendait depuis longtemps. Leur nom évoque à lui seul la liberté, l’originalité et l’insoumission. Gnawa diffusion, c’est plus qu’un mythique groupe de musiciens car pour des millions de jeunes fans algériens, ils sont le symbole même d’une Algérie qui ose espérer. Depuis 1992, date de la création du groupe à Grenoble, Amazigh et sa clique a sillonné le monde pour chanter la liberté, la justice et la dignité. L’esprit rebelle, le style rasta, le langage reggae et le cœur qui dit sans cesse basta à la hoggra, tels sont les ingrédients qui ont fait la gloire et le mythe de Gnawa diffusion. La verve révolutionnaire, les mots qui disent les vérités qui blessent et l’audace d’aller jusqu’au bout de ces engagements, tel est le caractère que Gnawa diffusion s’est forgé avec le temps.
Génération Gnawa, le qualificatif n’est pas fortuit. Loin de toutes exagérations, l’engouement populaire qu’a suscité la musique de Gnawa diffusion se mesure sur l’échelle de Richter. Le style Gnawi était le séisme salutaire d’une jeunesse algérienne en quête d’un mode d’expression capable de traduire ses hantises et ses ambitions.

Gnawa diffusion ont toujours chanté la diversité, la richesse du métissage et l’africanité que l’Algérie tentait de lui tourner le dos. Gnawa diffusion ont mis en relief le patrimoine musical et la culture d’un peuple si méconnu et injustement ignoré : le peuple Gnawas. Avec Amazigh et ses amis, une certaine Algérie, celle des vagabonds, des insouciants et des esprits libres, a retrouvé ses lettres de noblesse. « L’essentiel est de rester libre », disait à chaque fois Amazigh Kateb. Mais pour leurs innombrables fans, l’essentiel c’est qu’ils continuent à chanter comme ils ont toujours fait. Chanter malgré les drames, les déchirures et l’exil.

Cependant, le jeudi (du 19 avril) soir à la coupole, il fallait aussi chanter après une semaine où l’horreur a plané sur la capitale comme un nuage ô combien taciturne. Ce jeudi soir, Gnawa diffusion ont donné, au grand plaisir de leur fidèle public, un concert exceptionnel. Un concert qui s’inscrit dans leur dernière tournée en Algérie. Après Annaba, c’est à Alger qu’Amazigh avec sa troupe se sont produits sur scène pour la dernière fois. C’est dire donc toute l’importance de ce rendez-vous qu’il ne fallait pas rater sous aucuns prétextes.

Des 17 H, la coupole- ce temple qui a abrité les transes de l’adieu- est pris d’assaut par des centaines de fans impatients de voir défiler sur la scène leurs idoles de toujours. « Ce soir, il y aura de la folie à la coupole. Je m’attends vraiment à un concert extraordinaire. Â vrai dire, moi et mes potes nous sommes venus ici pour défouler et extérioriser notre rage contre les lâches dont nos frères étaient victimes la semaine dernière », nous confie d’emblée Khaled, un jeune aficionado de la musique Gnawi. « Ce soir, nos les jeunes on va dire basta aux terroristes. Vous ne nous faites pas peur. On va s’amuser, danser et chanter comme des fous. Et ça sera notre réponse à ces lâches de criminels », nous affirme de son côté Rym, look Gnawi et cheveux frisés avec boucles d’oreille et collier sahraouis autour du cou.

« Ce soir ça sera vraiment très chaud »

18 H 00. L’affluence du public est de plus en plus importante. Tous munis de leur ticket, sésame de la soirée, ils affichent un enthousiasme illimité. « Je suis quand même triste car on ne va plus les revoir sur scène. Mais je vais positiver toute de même puisque ce soir ça sera vraiment très chaud », nous annonce Ryad, 22 ans. Les minutes s’égrènent et l’ambiance s’allume comme un feu qui s’affermit petit à petit. Â l’intérieur de la coupole, on n’attend guère le début du concert pour commencer à faire la fête. De petits groupes se forment alors et des danses folkloriques s’improvisent. Chechs et gandouras, la tenue du Gnawi, ornent le décor de la majestueuse salle et la transforme en une superbe oasis.

18 H 30. La salle est archi-complet. Les fans s’impatientent. « Gnawas, Gnawas, Gnawas… », S’écrient-ils. Les spots publicitaires énervent encore plus les jeunes. « Ramenez-nous Gnawas, on veut que ça commence. Qu’est-ce qu’on attend encore ? », Renchérit un jeune visiblement déçu par une organisation défaillante. En attendant, la coupole succombe doucement au vacarme des dizaines de cliques qui se sont crées pour mettre de l’ambiance. Assis par terre, formant un cercle et savourant quelques joints en buvant des sodas, des chants ainsi que des couplets typiquement gnawis sont entonnés avec force et vigueur. A l’extérieur, une foule immense fait toujours la queue en passant par une série de stricts contrôles qui nous rappellent encore que le temps sécuritaire s’est bien gâté de nos jours.

Un concert inoubliable

19 H 30. Djmaoui Africa, le groupe qui assure la première partie du concert, fait enfin son apparition sur scène. La soirée commence sur une ambiance de folie. « Hey Mama, Hey Mama », « Salam Alikoum », et d’autres morceaux agrémentent et pimentent encore plus le début d’une soirée qui s’annonce envoûtante. La musique transporte les esprits dans un ailleurs indéfinissable. Le public uni sous les mêmes litanies, crie, s’écrie, danse et fait la fête sans que le moindre débordement soit signalé. Au bout d’une heure, Djamaoui Africa ont réussi à redonner du tonus à un public qui n’en demandait pas mieux. Vienne alors le tour de Gnawa diffusion, les stars de la soirée.

Des qu’on a annoncé leur nom, un mouvement d’hystérie s’est emparé soudainement de toute la salle. Aucun des fans n’a cessé des cet instant de scander le nom de ce groupe qui s’apprêtait à faire de ce show un spectacle inoubliable. Inoubliable est en effet très faible pour qualifier l’ambiance de folie qui bouillonnait dans les têtes de tous les fans. Plus rien n’est comme avant. S’en est fini de l’angoisse sécuritaire et de toutes les lourdeurs de la semaine.

« Gnawas, vous êtes les héros de ce pays. Vous êtes sa fierté. Je vous aime et je ne cesserai jamais de vous aimer », hurle un fan enflammé par sa passion pour le groupe. La fougue de d’autres fans s’est exprimée tantôt par des clameurs à la gloire de leurs artistes adorés, tantôt par des danses qui font pâlir les transes.

Amazigh met encore de la poudre au feu avec le dialogue qu’il engagea volontiers avec son public. « Djina, Djina… » Étrenne-t-il. « Djina, Djina ndiro Tchaklala, Tchaklala… » Ajoute-t-il. Inutile de décrire des lors la réaction déchaînée d’un public entièrement acquis au maestro de la soirée. Mais Amazigh a su toutefois convaincre des fans aux ardeurs affichés d’observer une minute de silence en souvenir des victimes des attentats du 11 avril. Après le silence en mémoire des morts, c’est le fascinant verbe des vivants qui reprend le dessus. « Â Al-Qaida, nous disons que nous, nous sommes Al-Waqifa.

Nous leur disons aussi qu’ils ne nous auront jamais. Ce soir on leur répondra par la musique », a-t-il décrété. Après Al-Qaida, c’est l’Oncle Sam qui en prend gros sur la figure. « Imaginez un instant que le visage de Bush, Blair, et les visages de tous ceux que vous n’aimez pas ici dans cette salle sont sous vos pieds. Que feriez-vous alors ? », Demande le Ché du soir. La réponse des fans n’a naturellement pas tardé puisque des milliers de petits bonds ont fait vibrer la coupole donnant l’impression que c’est une secousse sismique qui ébranla les lieux.

La suite de la soirée a donné le vertige à celui qui essayait de la relater. Ya laimy, Algéria, Douga Douga, Ouvrez les stores, Charlatan, Match Bétikh, tête avec Baghdad, sont les quelques chansons prises parmi tant d’autres qui ont fait basculer ce jeudi soir dans le paradis artificiel. « Celui qui ne souffre pas avec nous, qui ne goûte pas la misère avec nous, qui ne chante avec nous et qu’il nous aime pas, on lui dit… », Lance Amazigh à des fans survoltés. « On t’emmerde… », Répondent-ils avec inspiration.

De l’hystérie, certes il y en avait à la coupole ce jeudi soir. Mais c’est le bonheur qui canalisait cette hystérie le temps d’une soirée enchanteresse. Oui, c’est le bonheur du gnawi qui savoure sa liberté avec les siens. C’est le bonheur d’une victoire de la joie de vivre sur l’obscurantisme. Vers minuit, les lumières de la coupole ont été rallumées. Le message des autorités était clair : il est temps que ce manège se termine. Gnawas diffusions nous ont offert alors un majestueux « Salam Alikoum ».

Et les fans leurs avaient bien rendu la pareille. « Nous étions contents d’être là parmi vous. A la prochaine Alger et bravo les algérois… », Conclut Amazigh. A la sortie, tout le monde remerciait dieu d’avoir pu assister à ce concert historique. Les jeunes ont prouvé leur amour pour leurs idoles.

Mais ils ont surtout prouvé, et c’est ce qu’il faut certainement retenir, qu’on peut être jeune en Algérie sans devenir pour autant un Kamikaze….

le 08/05/2007

source



La musique est subversive, c’est un droit
Entretien avec Amazigh pour le monde.fr du 07/08/2007

mazigh Kateb, fils du dramaturge algérien Kateb Yacine (1929-1989), a fondé le groupe Gnawa Diffusion à Grenoble en 1992. Voici venir, dit-il, le temps de la séparation. Gnawa Diffusion, dont le nom provient de la culture africaine et de la religion syncrétique (animiste et soufie) transmise par les descendants d’esclaves au Maroc, en Algérie et en Tunisie, est en tournée d’adieu avec son cocktail de rock, de reggae et de musiques maghrébines. Le chanteur, qui vit en Algérie après dix ans d’interdiction de séjour dans son pays d’origine, revient sur “la force révolutionnaire de la musique”.

“Car sur ma terre natale se bâtissent de nombreux édi-FIS/Les minarets culminent et les écoles rétrécissent/FLN père et FIS nous mènent au sacrifice”, écriviez-vous dans Algeria en 1999. Votre vision de l’Algérie a-t-elle changé ?

Je suis arrivé en France en 1989. Quand j’ai fondé Gnawa Diffusion en 1992, j’avais 20 ans. L’armée algérienne m’a appelé pour deux ans de service militaire. J’ai refusé, et j’ai été considéré comme insoumis. En 1999, le président Abdelaziz Bouteflika a autorisé le retour en Algérie. En France, je m’étais créé mon Algérie, mon exil, avec des souvenirs d’enfance. J’allais souvent au Maroc respirer l’air du cumin. En 1994, à Essaouira avec un sac, un banjo et une fille que j’aimais. J’ai joué du banjo aux terrasses de café, j’ai fait l’écrivain public en espagnol.

Par deux fois, vous enflammez la ville d’Essaouira, berceau de la culture gnaouie, à l’occasion du Festival de printemps …

En 1999, puis en 2003, surtout. Il y avait 50 000 Marocains qui chantaient Algeria, dans la rue, quelle pagaille ! La musique est subversive, là on en finissait avec la rancoeur générée par la guerre du Sahara occidental (l’Algérie soutenait les indépendantistes du Front Polisario contre le Maroc). Avec le soleil, et le vent, traître, je bouillais, je n’ai pas dormi pendant une semaine, Essaouira était devenue une baignoire estampillée Gnawa Diffusion.

Et en Algérie, vous avez donné des concerts ?

Beaucoup. Certains incroyables. Nous avons joué dans la prison d’El Arrach à Alger, une prison pour les mineurs. Quelle émotion ! Les gamins dansaient avec les mains en X, comme menottés. La musique est un droit. A Alger, en avril à La Coupole du complexe sportif Mohamed-Boudiaf d’Alger. Nous avons demandé une minute de silence après les attentats (revendiqués par l’Organisation d’Al-Qaida au pays du Maghreb islamique). Puis 11 000 personnes ont entonné. “Houma qaida, H’na waquifa” (Eux, c’est l’assise, nous, nous sommes debout). C’est un cri de guerre de l’Algérie.

Quel est l’apport de Gnawa Diffusion, un groupe franco-algérien dont l’un des albums phares s’intitule Bab-El-Oued Kingston ?

Gnawa Diffusion a créé un phénomène, une génération africanisante, qui vient au concert avec des guembris (à cordes, instrument fétiche des gnawas) et des karkabet (clochettes de métal), parfois fabriquées avec de vieilles plaquettes de frein, comme on le fait en Jamaïque. D’un seul coup, cette génération a récupéré une identité davantage africaine qu’arabo-musulmane ou occidentale. Dans ce sens, nous sommes les enfants de Nass El-Ghiwan (groupe marocain pionnier du genre). J’ai récemment participé au projet Desert Rebel, dans le nord du Niger, avec des Touaregs. J’ai compris qu’il fallait éclater la géographie coloniale et l’héritage de l’Indépendance. Les racines africaines sont un vrai discours contre l’islam intégriste et la soumission.

Vous annoncez la séparation en septembre de Gnawa Diffusion. Qu’allez-vous faire ?

Gnawa Diffusion s’est séparé une première fois en 2001, et s’arrête pour en finir avec la complaisance. Je vais recréer Mohamed, prends ta valise, la pièce de mon père. L’hommage qui lui avait été rendu à la Comédie-Française en fut anecdotique, pas très “katebien”, c’est-à-dire joyeux, subversif. Je vais réaliser un road-movie en Algérie sur mes ancêtres. Retrouver la trace d’une de mes cousines qui était “m’qedma” (gardienne des saints).

Concerts : Festival des Calèches, Marrakech, le 8 août ; Festival du Chien à plumes, lac de Villegusien, Langres, le 10 ; Festival Rockmovies, place du village, Boffres, près de Valence, le 11 ; Feria de Béziers, le 12.

Propos recueillis par Véronique Mortaigne

Via dadou3x.net.

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vidéos:
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