Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Zighcult
9 octobre 2005

Le silence du désert


Mirage saharien aux confins de la Libye, Siwa la berbère reste une oasis mythique.

Au moindre congé, les Cairotes aisés fuient la capitale. Tournant le dos aux norias de touristes qui remontent la vallée du Nil jusqu'au Soudan, ils gagnent le delta fertile, la campagne du nord parsemée de pigeonniers et la côte de Méditerranée. Toujours plus à l'ouest, ils fuient vers Marsa-Matrouh, où les plages se couvrent d'ensembles balnéaires à l'occidentale baptisés New California, Venicia ou Costa del Sol.

Certaines sont encore en zone militaire, comme à El-Alamein, où reposent depuis 1942 les soldats de Rommel et de Montgomery. Là, le désert écrasé de chaleur est pierreux, monotone, à peine traversé par les chameaux et quelques véhicules tout-terrain.

Sous bonne escorte, c'est vers la Libye qu'il faut aller pour trouver les beautés des dunes et des palmeraies. Découvrir l'oasis cachée de Siwa, mirage saharien à 800kilomètres du Caire. Depuis Alexandre le Grand, cette oasis est un mythe. La légende veut que le conquérant macédonien de la Perse et de l'Egypte, après avoir fondé Alexandrie, vint à Siwa consulter l'oracle du temple d'Amon, le dieu des dieux. Ainsi un fils de Zeus reconnu dieu vivant des Egyptiens devenait le premier pharaon hellène. Nul ne sait si Alexandre, décédé à Babylone à l'âge de 33ans, ramené en Egypte, fut enterré à Alexandrie ou à Siwa. Dans l'oasis, la montagne des morts, le Gebel el-Mawta, est creusée de tombes où les sarcophages de l'époque gréco-romaine ont été pillés. Toutes n'ont pas été fouillées. Quatre d'entre elles, Si Amon, Niperpa Thot, Mesou Isis et la tombe dite du Crocodile, gardées et fermées à clé, contiennent des fresques murales comparables à celles des mastabas du Nil.

Située à 24mètres au-dessous du niveau de la mer à l'extrémité de la dépression de Qattara, Siwa la berbère s'étend sur 80kilomètres dans le désert de Libye avec ses villages de brique crue, ses palmiers, ses lacs salés. Restés très traditionnels, parlant peu l'arabe, ses habitants, les Issiwanes, vivent du commerce agricole, des dattes, des oliviers, de l'artisanat et se déplacent à dos d'âne ou à bicyclette. Fini le temps des caravanes. Le tourisme naissant nourrit de grands projets qui risquent de tout bouleverser. Ici, la vieille forteresse de Shali (« ville » en berbère), construite de rochers enduits de glaise et de blocs de sel, s'est écroulée lors de violentes pluies. Mais l'eau est tout pour la survie des hommes dans le désert : Siwa utilise les sources pour son système d'irrigation. Celle d'Aïn el-Hammam, surnommée Bain de Cléopâtre, est fraîche le jour, chaude la nuit.

A l'heure de l'appel du muezzin, avant même un premier chant de coq sous un palmier-dattier, quelle plus belle aventure que de partir tôt en 4x4 avec un guide pour bivouaquer dans ces dunes, au bout du monde… Surprise : sous le soleil brûlant, parmi les roches calcaires érodées par le vent, au détour d'une crête de la mer de sable, voici un étang surgi d'une source « miraculeuse », entouré de roseaux verts. A notre approche, deux hérons étonnés prennent leur envol. Le grand silence du désert s'installe.

Hugues Néel.
Le Nouvel Observateur.


Source: http://www.tamurth.net/article.php3?id_article=323

Publicité
Commentaires
Publicité
Albums Photos
Publicité