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Zighcult
6 juin 2006

Khadda et Remita - peintres

Mohammed Khadda

"Ivre de beauté", tout en se refusant à être "objet inerte", la lettre arabe "se veut mouvement, vibration", notait Mohammed Khadda (1930-1991) dont le nom fut associé à ce qu’on appela l’école du Signe. "Liée au rythme de la respiration de l’homme et au battement de son poul, elle dit, simule, suggère tout à la fois".
Peintre et graveur, né à Mostaganem, Khadda travaille très tôt dans l’imprimerie où il apprend le métier de typographe. Il se met également à dessiner, puis à peindre, avant de se rendre à Paris en 1953 en compagnie de Abdallah Benanteur.
Figuratif à ses débuts, il s’attelle à cerner sa propre identité et les ressources de son propre héritage, avant de s’engager dans la non figuration. Découvrant des peintres européens qui de Matisse à Klee se sont inspirés d’éléments de l’art musulman, l’artiste explorera le patrimoine plastique du Maghreb.

À Alger après l’indépendance, il participe aux débats qui traversent la jeune peinture algérienne et publie des articles* dans lesquels il prend position sur les questions liées à l’art moderne et à la place de l’artiste dans la société. Durant plus de trente ans, Mohammed Khadda, qui a également illustré nombre de recueils de poésie et créé des décors et des costumes pour le théâtre, a régulièrement exposé en Algérie, en Europe et dans le monde arabe.
L’artiste, dont l’oeuvre est représentée au Musée des Beaux-Arts d’Alger et au Musée d’art moderne de Paris, s’est éteint le 4 mai 1991 à Alger. Pour Rachid Boudjedra, qui fut l’un de ses compagnons de route, "Khadda, lecteur passionné du monde, érudit de l’écriture et de la poétique, engagé depuis toujours pour un homme debout, était ce peintre phare qui mélangea au fond de son atelier l’Orient et l’Occident, sans complexe. Il fera l’éloge du signe, de tous les signes porteurs de l’humain".

source


Mohammed Khadda naît le 14 mars 1930 à Mostaganem (Algérie).

Autodidacte, il commence en 1947 à réaliser aquarelles, pastels et peintures, alors qu'il est typographe et dessine les croquis des maquettes dans l'imprimerie où il travaille depuis 1944.

En 1953 il vient avec Abdallah Benanteur à Paris, où il dessine le soir à l' Académie de la Grande Chaumière, se lie avec le romancier Kateb Yacine, milite pour l'indépendance de l'Algérie et réalise sa première exposition personnelle.

Mohammed Khadda rentre en 1963 en Algérie où il expose régulièrement. Membre fondateur en 1964 de l'"Union Nationale des Arts Plastiques" dont il est le sécrétaire de 1972 à 1975, il y défend la peinture non figurative violemment dénoncée à cette époque, illustre plusieurs recueils de poèmes (Jean Sénac, Rachid Boudjedra) et crée des décors et costumes pour les Théâtres d'Alger et d'Oran (Abdelkader Alloula).

En 1971 paraissent ses Eléments pour un art nouveau, introduction à l'histoire de l'art en Algérie.

Mohammed Khadda travaille, entre 1973 et 1976, à la réalisation de plusieurs peintures murales collectives, accompagne de ses dessins, dans les années 80, des recueils notamment de Bachir Hadj Ali et Tahar Djaout et rassemble en 1983 dans Feuillets épars liés la plupart de ses articles et préfaces.

Il participe en 1986 à l'exposition inaugurale des collections permanentes de l'Institut du Monde Arabe de Paris.

Khadda préface en 1989 L'Arbitraire, texte (sur la torture) et poèmes de Bachir Hadj Ali, en 1990 un livre sur Mohamed Racim. Il œuvre simultanément à la constitution de sections algériennes de la Ligue des Droits de l'Homme et d'Amnesty International.

Il meurt à Alger le 4 mai 1991.

L'œuvre
Attentif à l'évolution de l'art occidental Mohammed Khadda découvre que de grands peintres européens, de Matisse à Klee, se sont inspités d'éléments de la culture arabe. Dès 1954 sa peinture se détache de toute figuration réaliste, ressentie comme étrangère à la sensibilité de l'art maghrébin, "un art non figuratif par excellence", écrit-il.

Dans les années suivantes son abstraction s'appuie sur les éléments plastiques de la graphie arabe. Ses Alphabets libres feront de lui l'un des fondateurs de ce que Jean Sénac nommera "l'Ecole du Signe".

Au début des années 60 les tracés noueux qui structuraient ses paysages non figuratifs se contractent et se réarticulent, à partir de 1967, autour du thème de l'Olivier qui, déclare-t-il alors, est "à la naissance des signes et de l'écriture" qu'il propose.

Ces signes, par la suite, vont d'une part se différencier en une continuelle expansion et lui permettre d'épeler toujours d'autres chiffres, comme on a dit à son propos, du "grand livre du visible", des failles de la pierre au vol de l'oiseau, des méandres de l'oued à la Calligraphie des algues. Ils vont d'autre part, comme poursuivant plus loin leur cristallisation, se déployer librement dans leur espace propre.

Découverte de l'écriture du monde et exploration du monde de l'écriture demeureront ainsi dans son œuvre indissociablement liées en deux cheminements complémentaires, chacun retentissant à mesure sur l'autre, qui ne cesseront de rapprocher par degrés le peintre, en une quête unique, des sources mêmes du Signe.

Dans les années 80 Mohammed Khadda ancre davantage son cheminement sur la Lettre. "Je n'ai jamais employé la Lettre pour la Lettre", précise-t-il, "dans mes peintures ou mes gravures, on retrouve un peu la forme des lettres, les formes parce que je me refuse à employer la Lettre arabe telle quelle".

Ses peintures ne se saisissent jamais, en effet, d'une écriture achevée, "inscrite" déjà, mais donnent à éprouver l'élan d'une écriture originairement "inscrivante". Explorant librement ses gestes, en amont des conventions qui les codifièrent dans l'avènement des premiers alphabets, Khadda se fait, a-t-on dit, "l'archéologue du possible".

source 1

source 2


Exposition mohammed khadda (1)

par malek alloula

     On pénètre dans le monde de Khadda non par effraction mais par un brusque arrachement qui transmue toutes valeurs acquises ou héritées et qui invite sans cesse à un réajustement de la perception.

     Si le peintre se tient en cette pointe avancée, où signes et couleurs précèdent l'aurore d'un jour à venir, c'est pour bâtir un langage nouveau — et pourtant ancestral — dont la trame parcourt une terre acquise de haute lutte et qu'il est seul à maintenir dans sa profusion.

     Cette lutte, chaque toile de Khadda en atteste l'existence sans jamais la priver de son mouvement et de sa fugacité illuminante.

     Cette vie, jamais trahie et qui s'ancre au plus profond niveau, trouve ici les signes précurseurs qui la cernent dans ce qu'elle a de plus énigmatiquement fuyant.

     On comprend, dès lors, que le choix d'une expression picturale n'obéit à aucune mode du jour, ni à aucune facilité, mais devient ce moyen privilégié de la recherche d'une vérité toujours se dépassant.

     S'il faut trouver une œuvre forte et précaire à la fois, celle de Khadda nous en offre l'exemple manifeste.

     Forte dans sa démarche, dans son mouvement qui la portent en ce point de fusion solaire où les couleurs éclatent sous la poussée d'un questionnement incessant et essentiel. Forte aussi dans son unité non plus fondée sur la répétition mais sur le renouvellement profond qu'exige toute œuvre digne de ce nom.

     Précaire sans doute parce que cette victoire momentanée, qui n'est jamais savourée pour elle-même, constitue une halte où s'équilibrent le nouvel élan, la nouvelle marche qui, chaque fois, remettent en question l'acquis.

     D'une toile à l'autre, on perçoit chez Khadda une exigence lucide qui est en même temps celle d'un peintre et celle d'un poète.

     Peintre, Khadda nous l'affirme par cette maîtrise qui, indéniablement, le porte au devant de notre horizon culturel et qui, dès lors, avalise le rejet d'une figuration jugée incompatible avec le dessein ultime.

     Poète, il nous parle, mieux qu'un autre, ce langage d'une terre dont il retrouve les emblèmes égarés et qu'il dispose sous nos yeux en des teintes où l'ocre, le rouge, le bleu et le noir retiennent dans leur enchevêtrement hiéroglyphique une lumière omniprésente qui est notre paysage mental.

     Mais, au-delà de sa force et de sa précarité, au-delà de sa poésie et de son exigence, la peinture de Khadda nous dit une inquiétude permanente qui lui donne une dimension humaine et abolit l'image du peintre enfermé dans son univers ou son atelier.

     Généreuses, les toiles de Khadda vont toujours au devant du peuple pour nouer le dialogue dont l'instauration demeure l'objectif dernier.

     C'est cette capacité de parler et d'écouter qui définirait peut-être le mieux la peinture de Khadda.

     Dialoguer non plus au niveau de poncifs et de lieux communs déshonorants mais à un niveau ultime où a lieu la plus forte enchère qui soit : celle d'une œuvre et d'une vie à la recherche de leur sens le plus profondément humain. Nul mieux que Khadda n'a porté ce besoin à un tel point d'exigence et de lucidité.

     S'il réalise et appelle de ses vœux une peinture monumentale c'est parce qu'il est certain que seul le verdict du plus grand nombre est l'amplificateur légitime d'une œuvre qui tient par toutes ses fibres à ce substrat collectif.

     L'œuvre rejoignant la vérité d'où elle est partie bouclerait le cercle en ouvrant « la voie royale » qui n'est plus celle d'une aristocratie désuète mais celle d'un peuple reconnu et se reconnaissant.

     C'est pour cela que les toiles de Khadda ne sont plus objet de délectation mais jalons en ce lieu d'éveil où tout est à naître avec le jour prochain. C'est pour cela aussi qu'elles ne seront jamais objet d'indifférence.

     Nous avons voulu ces lignes paroles sur une peinture. Nous demeurons, cependant, persuadés qu'à partir d'un certain seuil de qualité, où se tiennent depuis longtemps les toiles de Khadda, toute parole qui ne serait pas cette peinture même tournerait sans cesse dans l'ornière de la paraphrase.

     N'est-ce pas là le signe qu'une œuvre a formé son propre langage supérieur à tout autre ? Si notre propos reste, malgré sa sincérité objective, sur les premières marches de cette œuvre nous voulons y voir l'illustration de la vérité d'un art devenu majeur au sens le plus plein et le plus prometteur du terme.

source


Grande exposition de Khadda au Musée national des beaux-arts

par B. R. édition 2434 du dimanche 30 avril 2006 jeune-independant.com
Cette année, le mois du patrimoine sera consacré à l’artiste peintre Mohammed Khadda, décédé le 4 mai 1991. C’est ainsi que le Musée national des beaux-arts organise, à partir de mercredi prochain, une exposition d’une centaine d’œuvres de cet artiste, provenant du Musée national des beaux-arts, du Musée Zabana d’Oran, ainsi que diverses collections privées.

Cette exposition, qui s’étalera jusqu’au 15 juin prochain, sera rehaussée par la présence de Mme Nadjet Belkaïd Khadda, épouse du défunt artiste, ainsi que des représentants des institutions culturelles. Par ailleurs, la Bibliothèque nationale d’Alger abritera une exposition d’affiches du 23 au 30 mai prochain, ainsi que deux journées d’études, les 23 et 24 mai, consacrées à l’œuvre de Mohamed Khadda et ayant pour thème «La place de Mohamed Khadda dans l’art du XXe siècle».

Quant à l’Ecole supérieure des beaux-arts, elle accueillera une table ronde le 2 mai, à partir de 9 h. Mohamed Khadda est né le 14 mars 1930 à Mostaganem. Il est considéré comme l’un des fondateurs de la peinture algérienne contemporaine et l’un des principaux représentants de ce que l’on nomme l’Ecole du signe.

Autodidacte, il commence en 1947 à réaliser des aquarelles, des pastels et des peintures, alors qu’il est typographe, et dessine les croquis des maquettes dans l’imprimerie où il travaille depuis 1944. En 1953, il part avec l’artiste peintre Abdallah Benanteur pour Paris où il dessine, tous les soirs, à l’académie de la Grande Chaumière.

Se liant d’amitié avec le romancier Kateb Yacine et militant pour l’indépendance de l’Algérie, il réalise, à Paris, sa première exposition personnelle. Mohammed Khadda retourne en Algérie en 1963, où il expose régulièrement. Membre fondateur, en 1964, de l’Union nationale des arts plastiques, dont il est le secrétaire de 1972 à 1975, il y défend la peinture non figurative, violemment dénoncée à cette époque, illustre plusieurs recueils de poèmes (Jean Sénac, Rachid Boudjedra…) et crée des décors et costumes pour les théâtres d’Alger et d’Oran, pour des représentations de différents auteurs, comme Abdelkader Alloula.

Entre 1973 et 1976, Mohammed Khadda travaille à la réalisation de plusieurs peintures murales collectives. Dans les années 1980, il accompagne de ses dessins des recueils, notamment ceux de Bachir Hadj Ali et de Tahar Djaout, et rassemble, en 1983, dans un recueil, la plupart de ses articles et préfaces.

B. R.

source


MORT DU PEINTRE ALGERIEN MOHAMED KHADDA

source

Le peintre algérien Mohamed Khadda, considéré dès les années 50, comme un maître de l’école algérienne dite « du signe » (l’appellation est du poète pied-noir Jean Senac) et une célébrité des arts plastiques dans tout le Maghreb, est mort samedi matin en son domicile d’Alger, qu’il venait de regagner après avoir été soigné en France d’un probable cancer. Né à Mostaganem en 1930, autodidacte, maçon en métropole, puis ouvrier imprimeur, il parvient à exposer à Paris, Lyon, puis Alger. Son apport réside dans son refus à perpétuer les sujets et les techniques de la peinture islamique classique (il est l’auteur d’un pamphlet, « Eléments d’un art nouveau »). Sans pour autant se ranger docilement à l’abstraction moderne, qui l’inspire cependant, et qu’il travaille sur des thèmes de sa propre culture : calligraphie, arabesques, tatouages (d’où l’école du signe). Mohamed Khadda était communiste.


REMITA

Né dans une famille de cheminots algériens, Remita étudie la peinture, la publicité et l'infographie, il entame sa carrière comme illustrateur et dessinateur de presse, puis se dirigea vers le design graphique et l'infographie, esprit anticonformiste, il se détourna d'une carrière publicitaire pour se consacrer à l'art plastique, sa plus grande passion. Son travail de jeunesse révèle déjà son goût pour le signe, il devait subir alors une triple influence : la calligraphie arabe, le signe berbère et l'architecture des médinas du Maghreb. Après avoir été sensible à l'oeuvre de Khadda, d'Atlan et d'Issiakhem, il doit sa libération artistique en termes de maniement d'éléments plastiques, on y trouve le fourmillement sinueux, les entrelacs et les arabesques qui installent un langage dispersant et souvent dramatique, il étudie la possibilité plastique de la calligraphie arabe et extrême orientale ainsi que du signe berbère, ses peintures révèlent alors une expression à la fois violente, brutale mais profondément mystique, déroutante et énigmatique, rendue dans une matière épaisse et des textures empattées, cette expression traduit sa conception d'un être révolté condamné à la solitude de celui qui lutte pour repérer une voie dans les ténèbres conventionnelles et qui en dépit de tout, y parviendra. Après "le huppe messagère" sa dernière exposition et le vibrant hommage qu'il avait rendu à Jean Michel Atlan précurseur de la peinture moderne algérienne, Remita poursuit ses errances à travers les espaces -demeures-mémoires- du Maghreb. Dans cette nouvelle série il retrace l'extraordinaire résistance de vivre en se nourrissant de minuscules tranches d'espoir, au milieu des cratères et des hécatombes. Peintre de l'espace maghrébin, Remita en dégage la poétique avec toute la complicité qui le lie à son environnement. Il en restitue l'identité, témoignage du temps qui passe, hommage à un espace générateur d'évasion et de méditation. Les oeuvres ressentes de Remita parlent du vécu d'un homme, de ses extases, de son étonnement, il semble trempé dans l'originalité d'une aire de civilisation dans laquelle il trouve son rythme et s'exprime. Dans cette série, le réel n'est pas ce que l'on voit: il est -comme " la vraie vie" ailleurs dans l'invisible, dans l'impossible pure possibilité, unité des contraires, retour et origine, contradiction existentielle. Cet espace métaphysique, rythmé comme une (sama) de "derviches tourneurs"en folie nous fait courir vers notre propre mystère, l'artiste alors, a remplie sa sulfureuse mission: après son passage, il nous est impossible de simplement tourner la page.

Nouzha el-Fassi

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